Philippe Scialom - Psychologue Psychothérapie - Psychologie - Psychanalyse - Psychomotricité Enseignement - Cours - Articles - Guidance - Informations - Aides Parents - Enfants - Ados - Etudiants
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LA PREVENTION DE LA CHUTE DE LA PERSONNE AGEE EN PSYCHOMOTRICITE.

Leslie Cohen-Dadoun, psychomotricienne D.E, responsable d’Equipe Spécialisée Alzheimer.

 

La personne âgée est soumise à un vieillissement de l’appareil locomoteur : La fibre du muscle squelettique diminue en densité, impliquant une diminution de la masse musculaire et donc, fonctionnellement, de la force musculaire, ce qui aura un effet sur le tonus du sujet. Une perte minérale osseuse se produit, accompagnée d’une réduction de la résistance mécanique de l’os. Enfin, le cartilage s’amincit et la perte hydrique globale induit une réduction de l’élasticité et de la mobilité des articulations, entraînant une altération de ses propriétés mécaniques à l’origine d’une fragilité. Des troubles de l’équilibre et de l’orientation temporo-spatiale s’y associent souvent en amplifiant l’ensemble du phénomène. Ce vieillissement entraîne un manque de sécurité et de stabilité dans les déplacements, avec une augmentation des chutes.

La chute génère souvent un véritable traumatisme, aussi appelé dans la littérature spécialisée « traumatisme post-chute ». Ce traumatisme peut être physique (ex : fracture du col du fémur) ou d’ordre psychologique et susciter chez la personne un véritable questionnement sur la diminution de ses capacités : la « chute », prend alors le sens de « dégradation », de « perte ».

 

La prévention de la chute passe par différentes étapes :

 

- L’information : de nombreuses chutes sont dues à des causes extérieures aux capacités motrices de l’individu, notamment des chaussures non-adaptées (ouvertes à l’arrière), ou à un manque de vigilance vis-à-vis de l’environnement, comme des différences de hauteurs de sols par exemple (marche, tapis…). Il est également nécessaire de réaffirmer, en collaboration avec l’ergothérapeute, l’importance de l’utilisation des aides techniques (canne ou déambulateur), et revoir avec les patients leurs utilisations si celles-ci ne sont pas appropriées et deviennent une cause de chute.

 

- Les ateliers de prévention de la chute : ils permettent un travail corporel concret afin de prévenir les chutes. Les séances s’organisent de plusieurs façons dans le but de renforcer la musculature et le tonus musculaire, consolider l’équilibre, valoriser les capacités et réinvestir positivement son corps.

1. Renforcer la musculature : cela passe par des échauffements articulaires et musculaires, suivis d’exercices variés : comme l’utilisation de ballons plus ou moins grands (se passer le ballon avec les mains, les pieds, debout, assis, à une main…), ou l’utilisation de bâtons de gymnastique rythmique permettant une expression esthétique des variations toniques du bras, ou encore l’utilisation de son propre corps par des exercices d’expression corporelle faisant travailler les muscles et les articulations (mimes, danse…). Cette liste n’est pas exhaustive, et ne pourrait l’être, car elle dépend de la créativité de chacun (autant le patient que le thérapeute) dans la mise en mouvement de son propre corps, et dans la rencontre et l’adaptation au corps d’autrui.

2. Consolider son équilibre : Dans les ateliers de prévention de la chute certaines médiations sont très appréciées des personnes âgées, comme la danse de salon, qui permet un véritable travail de l’équilibre autour d’une activité ludique qu’ils retrouvent souvent avec plaisir. Des exercices inspirés du Tai-chi sont également souvent utilisés et proposés pour renforcer l’équilibre, etc.

3. Valoriser ses capacités : une personne âgée qui a déjà chuté ou qui appréhende la chute se met d’emblée dans une position de protection en limitant au maximum ses déplacements et ses mouvements. Cette attitude, bien que compréhensible, est délétère, car les muscles soumis à l’inactivité ont tendance à s’atrophier et à perdre de leur tonus. La station debout devient de plus en plus difficile. A terme, tout ceci peut mener à un syndrome de régression psychomotrice. Lors des ateliers de prévention de la chute, être présent et accompagner la personne dans la redécouverte de ses capacités oubliées/perdues lui permet de se sentir plus en confiance et sécurisée pour éprouver son corps, puis se rendre compte d’elle-même qu’elle est encore « capable ». La relation établie par le thérapeute et le cadre d’exercice sont au centre de cet accompagnement corporel. Par la suite, la personne âgée pourrait retrouver plus d’autonomie et assez d’assurance pour se mouvoir seule, hors cadre.

4. Réinvestir positivement son corps : Enfin, abordons la question centrale du corps et son investissement par la personne âgée. Une personne qui bouge peu (par apathie, ou à cause d’un corps algique) réduit ses expériences sensori-motrices, ce qui modifie sa perception corporelle : moins on ressent son corps et moins on l’investit. Il n’est pas rare de voir des personnes âgées ne plus être capables de localiser précisément certaines parties de leur anatomie. La gymnastique douce permet ainsi de remettre en mouvement son corps. Le patient se le réapproprie peu à peu au fil des séances, en fonction d’un vécu le plus souvent positif.

 

- Tomber sans chuter-se relever

Rassurer la personne âgée est le dernier point dont nous allons discuter. La personne qui n’a pas encore chuté peut diaboliser la chute. Celle qui a déjà chuté, en fonction du traumatisme, l’appréhendera plus ou moins. Dans tous les cas, le thérapeute doit pouvoir contenir cette peur et dédramatiser la situation. Il est nécessaire d’expliquer aux personnes âgées que les chutes n’ont pas toutes une issue tragique. C’est un véritable apprentissage de leur proposer un entraînement adapté pour tomber et se relever en diminuant les risques et les appréhensions. Lors de ces ateliers appelés « atelier relevé de sol », la succession méthodique des gestes est ainsi « réapprise » aux personnes âgées afin qu’elles se réapproprient la manière de se relever du sol à la suite d’une chute, si elles n’éprouvent pas de douleur.

 

Vignette clinique :

Mme B, 87 ans, a fait de nombreuses chutes avant d’arriver à l’EHPAD. Elle utilise sa canne de manière inappropriée : elle ne s’appuie pas dessus et la tient dans sa main en la faisant trainer derrière elle. Mme B. présente un syndrome post-chute : elle a une attitude d’évitement lorsqu’elle est assise (elle est affalée sur sa chaise) et refuse de se lever de son siège sans nécessité absolue.

Nous avons commencé le travail de prévention de la chute en lui apprenant à se servir de sa canne, puis nous l’avons introduite dans les ateliers de gymnastique douce. Au début, elle n’était pas participante, et lorsqu’on l’a questionnée sur les différentes parties du corps qu’on échauffait en début d’activité, elle ne nous répondait généralement pas.

Au fur et à mesure, elle a commencé à entrer dans la dynamique du groupe et à répondre à nos questions et aux sollicitations des autres participants. Nous avons pu remarquer une modification de sa position en station assise, ainsi qu’une plus grande confiance en ses capacités. Après quelques mois de participation, Mme B. s’est levée pour aller à la rencontre d’autres résidents de l’EHPAD, et non plus par seule nécessité.

L’équipe a également mis en évidence plusieurs changements :

- son humeur s’est améliorée. Sortie de son isolement elle prend désormais part aux conversations et paraît plus épanouie dans son lieu de vie.

- Mme B. participe plus activement à sa toilette du matin. Cet autre résultat rapporté par les aides-soignantes témoigne bien aussi de ces mois de travail autour du réinvestissement de son corps.

L’intégration de Mme B. dans une prise en charge de prévention de la chute a concouru à une amélioration globale de son humeur et de sa condition physique, à redynamiser ses capacités à communiquer socialement ainsi qu’à faciliter sa prise en charge dans les soins d’hygiène.

 

 

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